La trahison de 1979 : la chute de l’Iran dans l’étreinte des ténèbres


Dans l’histoire des nations, il est des dates qui non seulement infléchissent l’avenir, mais enchaînent des générations et consument les richesses d’un pays. Pour l’Iran, le 11 février 1979 (22 Bahman 1357) est de ces jours funestes : non une fête, mais l’anniversaire d’une immense trahison dont l’ombre lourde pèse depuis plus de quatre décennies. Une trahison vendue au peuple sous le nom de « révolution », qui fut en réalité un coup d’État organisé contre l’indépendance, le progrès et la modernité de l’Iran.

Un complot contre l’Iran, non une révolution pour l’Iran

Un récit falsifié s’est incrusté dans les esprits : l’idée qu’en 1979, un peuple unanime se serait soulevé contre son gouvernement pour « faire la révolution ». La réalité est tout autre : l’Iran ne fut pas le théâtre d’une insurrection populaire, mais la victime d’un putsch idéologique fomenté par les partis de gauche, les Moudjahidine du peuple et les partisans de Khomeiny, avec l’aval et l’amplification des médias occidentaux—un coup monté contre la trajectoire d’un pays en marche vers la modernité.

Sous le couvert de slogans démagogiques et de promesses mensongères, ces groupes ont jeté dans la rue des citoyens qui, pour l’essentiel, réclamaient des réformes—et ils ont renversé un État qui conduisait l’Iran vers le développement. Dès l’aube de ce mouvement, il était clair que leur objectif n’était ni la liberté, ni l’indépendance, ni les droits humains, mais l’effondrement de l’ordre et de la sécurité et la restauration d’un obscurantisme clérical digne du Moyen Âge.

La direction de ce complot échut à des courants qui, depuis des années, tramaient la chute d’un gouvernement stable sans en trouver l’occasion. Ils exploitèrent l’émotion populaire, mobilisèrent les relais médiatiques, et—avec la complaisance d’acteurs extérieurs—s’emparèrent du destin d’une nation pour la faire reculer. Les médias occidentaux et certains « intellectuels » félons, à l’intérieur, y tinrent un rôle majeur. Les analyses historiques démontrent, par exemple, la part de BBC Persian dans la fabrication de l’aura d’un Khomeiny présenté comme « leader de la liberté ». Ce qui fut accompli, c’est la destruction d’un pays par la propagande—le triomphe de mensonges médiatiques au service d’agendas extrémistes et subversifs.

Ingérences étrangères et connivences avec les traîtres de l’intérieur

Le rôle des puissances étrangères dans cette grande trahison ne saurait être minimisé. Les politiques occidentales visant à renverser le gouvernement légal iranien pour le remplacer par un régime religieux fondamentaliste furent déterminantes.

La France, de longue date, a joué un rôle délétère dans les affaires iraniennes. De velléités néocoloniales en accommodements avec des groupes extrémistes, elle a souvent œuvré à maintenir l’Iran dans la crise et la dépendance. En 1978-1979, elle offrit asile à Khomeiny à Neauphle-le-Château, lui procurant une plateforme médiatique planétaire pour façonner un personnage de pacificateur—miroir trompeur qui séduisit une partie de l’opinion iranienne. Les médias français et l’appareil politique permirent ainsi à une figure marginale de se hisser au rang de chef d’un mouvement qui précipita l’Iran dans l’abîme. Paris laissa des opposants au régime du Shah organiser, depuis son sol, la coordination d’une chute politique majeure—et, des années plus tard, au mépris de ses discours sur la démocratie, observa d’un silence éloquent les soulèvements populaires iraniens contre la République islamique.

La trahison ne s’arrêta pas là : la France est devenue l’un des principaux sanctuaires des Moudjahidine du peuple, groupe compromis dans le sang de milliers d’Iraniens. Chaque année, ils y tiennent des rassemblements d’envergure, avec la participation de responsables politiques européens, bien au fait de la nature sectaire et violente de cette organisation—sans que leur soit retirée la respectabilité de façade.

Pourquoi cette ligne française ? Elle s’enracine dans une vision stratégique de long terme : garder l’Iran déstabilisé pour l’empêcher d’accéder au rang de puissance indépendante. Quelques exemples :

  • Appuis aux séparatismes au Khuzestan et au Baloutchistan : soutien informationnel et financier, durant les années 1950-1960 notamment, à des mouvances centrifuges pour miner l’unité nationale.

  • Entraves aux projets industriels de l’Iran dans les années 1970 : restriction de coopérations nucléaires et technologiques, blocage de projets de centrales, afin de freiner l’autonomie stratégique.

  • Soutien à des oppositions radicales, y compris contre le gouvernement Pahlavi.

  • Hébergement des Moudjahidine du peuple, pourtant complices du régime de Saddam Hussein durant la guerre Iran-Irak.

  • Amplification médiatique des mouvements à coloration séparatiste, orientant des colères sociales vers des horizons de démembrement territorial.

De l’asile offert à Khomeiny en 1979 au soutien logistique et symbolique apporté ensuite aux Moudjahidine, la France s’est révélée—loin des proclamations—l’un des adversaires constants de l’indépendance iranienne, parée des atours d’une démocratie en croisade mais fidèle à ses calculs géopolitiques.

La trahison des gauches, l’illusion des foules

Les partis de gauche, hostiles à la modernisation de l’Iran, se firent l’instrument de forces dont l’objectif n’était autre que la ruine du pays. Aux côtés des clercs et des fondamentalistes, ils préparèrent le retour de la réaction. Au nom des « classes populaires », ils contribuèrent à détruire ce qui pouvait précisément conduire à la prospérité sociale et économique.

Leurs slogans—« justice sociale », « égalité »—enflammèrent la jeunesse, sans conscience des conséquences. Ils crurent qu’en abattant la monarchie, ils bâtiraient une société plus juste—sans voir qu’ils livraient la nation à une théocratie. Le châtiment fut immédiat : une fois les mollahs installés, la gauche fut broyée aussi vite que les monarchistes.

Les leçons de 1917 leur avaient échappé : les mouvements anarchisants et gauchistes, sans architecture d’après-victoire, sont les premières victimes des révolutions qu’ils déclenchent. Ce que furent les goulags pour les communistes russes devint, en Iran, la prison et la potence pour les militants de gauche, utiles un temps, sacrifiés aussitôt.

Les Moudjahidine du peuple : le poignard planté dans le dos de la nation

Parmi les acteurs de 1979, le nom des Moudjahidine du peuple brille d’un éclat sinistre. Cette organisation, se drapant de « lutte pour le peuple », jeta le pays au chaos. Elle fut des premières à pousser les foules dans la rue, ouvrant la voie à Khomeiny. Une fois le pouvoir absolu concentré entre les mains du clergé, elle vira de bord pour combattre la République islamique—trop tard. Se réclamant d’abord « soldats de la révolution », ses cadres se muèrent en mercenaires au service des ennemis de l’Iran, allant jusqu’à combattre aux côtés de Saddam Hussein contre leurs compatriotes durant la guerre.

Secte politico-religieuse, les Moudjahidine se présentèrent comme héros de la liberté ; évincés, ils glissèrent dans la collaboration avec l’ennemi extérieur, devenant un instrument étranger de nuisance, honni par la société iranienne.

Khomeiny et ses soutiens : les ennemis principaux de l’Iran

Au centre, Khomeiny et son cercle de fidèles fanatisés : un homme qui n’est jamais venu pour la liberté, le bien-être ou la justice, mais pour dresser une dictature cléricale, transformer l’Iran en prison et en paria. Il promit l’électricité et l’eau gratuites, la consolidation de l’armée, la liberté vestimentaire des femmes. En quelques mois, le masque tomba.

Khomeiny a ravagé l’Iran, mais la faute ne lui appartient pas seul : ceux qui lui ouvrirent la route portent l’essentiel du blâme. Il fut l’exécuteur d’un dessein plus vaste, soutenu par des radicalités intérieures et des appétits extérieurs. Clercs ambitieux et politiques opportunistes furent tous complices d’un désastre national.

L’Iran avant la trahison de 1979 : un pays sur la voie du développement

En 1979, l’Iran était non seulement un État émergent, mais l’une des cinq économies majeures d’Asie. Sur la rampe de l’industrialisation, engagé dans de vastes chantiers, doté d’une participation féminine croissante à la vie publique, il avait consolidé son rang international.

Les données économiques de l’époque—au rebours des propagandes—montrent que :

  • le chômage était inférieur à 6 % ;

  • le rial était stable et fort face au dollar ;

  • l’Iran était le premier producteur de l’OPEP ;

  • le revenu par habitant surpassait celui de plusieurs pays européens ;

  • l’armée iranienne figurait parmi les plus équipées de la région, et sa force aérienne, après les États-Unis et l’URSS, passait pour l’une des plus puissantes.

La trahison de 1979 a réduit ces acquis en cendres : la répression s’est abattue, l’économie s’est effondrée, les femmes ont été asservies, et la dictature religieuse a remplacé un gouvernement engagé sur la voie du progrès.

Quarante-six ans de dévastation : l’heure est venue de réparer la trahison

La trahison de 1979 se prolonge, mais une génération nouvelle a surgi qui a percé l’illusion. Elle ne se laisse plus berner par les slogans creux. Dans les rues, elle a crié « Femme, Vie, Liberté », exigeant la fin d’un régime né de cette trahison historique.

L’Iran est notre maison. Cette terre est l’héritière de Cyrus et de Darius, non le fief de Khomeiny et de ses bourreaux. Le 11 février n’est pas un jour de liesse : c’est un jour de mémoire, pour que jamais ne se répète pareille félonie.

Nous sommes à l’instant du choix : ou nous brisons ce cycle de trahisons, ou nous contemplons une déliquescence accrue. Le remède ? La lucidité.

C’en est fini d’oublier l’histoire. Il faut la lire droit, comprendre que l’ennemi de l’Iran n’était pas un gouvernement légal sur la voie du développement, mais une cohorte de démagogues et de traîtres qui ont plongé le pays dans la nuit.

L’Iran brillera à nouveau—le jour où ses enfants reconnaîtront la trahison de 1979 et empêcheront que se renouvelle un tel mensonge.

Ehsan Tarinia – Luxembourg
Écrit le 10 février 2025