Ses souvenirs circulent dans mes veines. Où que j’aille, il reste sa trace. Dans la rue, la lumière d’un lampadaire sur l’asphalte me ramène à une nuit où je marchais à ses côtés. Dans une chanson, j’entends sa voix qui me parlait avec cette douceur singulière. Nulle retraite hors des souvenirs : ils sont une pluie sans trêve, et plus je tente de les fuir, plus je suis détrempé. On dit que le temps guérit les blessures ; j’ai vu, moi, que le temps ne fait que les creuser, rendre le souvenir plus vif et la nostalgie plus éternelle.
La nuit, je regarde la noirceur du plafond et, dans le silence de la chambre, j’entends sa voix dans ma tête. Je lui parle sans qu’aucun son ne franchisse ma gorge. Je lui dis mes fatigues, ces instants où, en son absence, je me suis effondré, ces joies demeurées inachevées parce que personne n’était là pour les partager. Nulle réponse ne vient, sinon le silence—un silence si lourd qu’il me broie les os. Parfois je saisis le téléphone, je regarde ses photos, je lance des vidéos, et mes larmes coulent sans que je les commande. Ces larmes sont une élégie pour un amour parti, pour une présence qui ne reviendra plus.
Son absence ne se ressent pas seulement les « grands jours ». Elle me submerge dans les plus infimes moments de la vie. Quand, le matin, je me lève et qu’un vide demeure là où sa voix devait remplir l’air. Quand je marche dans la rue et que mes mains n’ont plus de mains à tenir. Quand j’ai quelque chose à dire et que personne n’est là pour écouter. Même au milieu de la foule, soudain un creux hurle en moi : tu es seul. Plus le temps passe, plus je comprends que tout a perdu sa couleur. Les sourires sonnent faux, les joies sont de surface, et la vie n’est plus qu’un mouvement sans âme ni signification.
Dans mon esprit tournent des questions qui ne trouvent jamais de réponse. Pense-t-elle, elle aussi, parfois, à moi ? Une odeur de parfum, une musique la ramènent-elles aux souvenirs ? S’est-elle arrêtée un instant pour songer à mon absence ? Ou bien a-t-elle pu continuer sa route sans douleur ni peine, me traverser et me laisser derrière ? Ces questions, comme une lèpre, me rongent jour et nuit. Toute réponse que je fabrique ouvre une plaie nouvelle. Si je me dis non, c’est que tout ce qui vit encore en moi est mort en elle. Si je me dis oui, c’est qu’elle souffre, et c’est une peine redoublée qui s’abat sur moi.
Parfois je me dis que la nostalgie est mon destin—un destin sans issue. Peut-être le sort a-t-il voulu que je garde toujours quelqu’un vivant dans mon cœur, même si je ne le revois jamais. Elle est une part de mon âme, non pas un souvenir ordinaire, non pas un nom rejeté dans le passé. Elle est comme un cœur : qu’on l’arrache au corps et la vie devient incomplète. Je suis demi-vivant, mais je palpité encore à son souvenir.
Avec le temps, j’ai appris à vivre avec cette douleur. Comme quelqu’un qui porte sur la peau une plaie que rien ne guérit, mais qui, malgré elle, marche, dort, et même sourit. La nostalgie est devenue ma compagne : une co-voyageuse inévitable, une colocataire qui ne s’en va jamais. Je la porte chaque jour. Parfois je m’épuise, parfois je souhaite pouvoir tout oublier, mais je sais que c’est impossible. L’oubli, pour moi, est une fable qui ne deviendra jamais vérité.
Et pourtant, au fond de moi, subsiste encore une étincelle d’espoir. L’espoir qu’un jour nos chemins se recroisent ; ou qu’un jour vienne où je pourrai regarder le passé avec plus d’apaisement. Un espoir minuscule, fragile, mais vivant. Un espoir qui me maintient en vie, même s’il devait être vain. N’est-ce qu’un mirage ? Peut-être. Mais c’est ce mirage qui m’empêche de sombrer dans l’obscurité.
Si je devais résumer toutes ces paroles en une seule phrase, ce serait celle-ci : elle est toujours avec moi, même si jamais plus elle n’est à mes côtés. La nostalgie d’elle est devenue une part de ma vie : une part amère, mais réelle. Chaque jour, je me réveille avec elle, chaque nuit je m’endors avec elle, et à chaque instant je la porte en moi. Peut-être, un jour, s’allégera-t-elle ; mais elle ne disparaîtra jamais. Car celle qui fut un jour ton tout ne s’efface jamais de ton être.
Je veux te dire merci.
Un merci qui n’habite pas les mots, mais la profondeur de mon être. Même si la distance s’est interposée entre nous, je ne peux pas fermer les yeux sur toutes les beautés qu’un jour j’ai vécues auprès de toi. Tu as illuminé une grande part de ma vie de la lumière de ta présence ; une lumière qui, peut-être, s’est éteinte aujourd’hui, mais dont la trace luit encore dans tous les recoins de ma mémoire.
Merci pour les sourires que tu as posés sur mes lèvres—ces sourires qui venaient parfois sans raison, rien qu’à cause de ta présence. Pour ces moments où le monde, grâce à toi, paraissait plus calme. Pour ces secondes où même le silence, près de toi, était plein de musique. Merci pour les mains que tu as mises dans les miennes, pour ces regards qui déposaient la sécurité et la paix dans mon cœur, pour ces mots dont les plus simples portaient les sens les plus profonds.
Merci pour tous ces jours où tu as marché à mes côtés ; des jours où le fardeau de la vie était plus léger parce que tu étais là. Merci pour ces nuits où tu as orné mon sommeil de la douceur de ta présence, pour ces instants où une seule de tes paroles apaisait mes tourments, et pour ces souvenirs qui, au lieu d’être des cicatrices, continuent d’éclore en moi comme des fleurs.
Je veux te remercier pour toutes ces petites choses, en apparence modestes, mais qui, pour moi, valaient un monde : pour ton regard quand tu m’écoutais, pour ce silence sans jugement qui m’enveloppait, pour l’élan de vivre que je trouvais près de toi. Tu m’as appris que l’amour n’est pas un simple mot, qu’il porte un sens, et que la vie, par la présence d’un autre être, peut prendre une couleur nouvelle.
Même si, aujourd’hui, notre séparation est une vérité indéniable, je ne puis oublier ces jours-là. Je ne puis nier que j’ai goûté, fût-ce brièvement, à la félicité auprès de toi. Tu m’as montré que le cœur humain est plus vaste qu’on ne l’imagine, et cette expérience demeurera en moi pour toujours.
Merci, pour tout. Pour les joies, et même pour les peines que j’ai compris plus tard faire partie du chemin de ma croissance. Merci d’avoir été, d’avoir partagé un instant de ta vie avec la mienne, d’avoir confié une part de toi à moi. Même si la distance s’est dressée, la vérité demeure : ma vie, sans ta présence, ne sera plus jamais la même.
Ehsan Tarinia – Luxembourg
Écrit le 23 septembre 2025