Le boycott des élections sous la République islamique


Dans la campagne qui s’est engagée, tant à l’intérieur du pays qu’au-delà de ses frontières, une étonnante unanimité se fait entendre autour d’une seule phrase : « Non à la République islamique ». Cette voix commune est remarquable et salutaire. L’odeur de corruption, d’oppression, d’incompétence, de cupidité, d’arrogance et de dictature, de même que le pillage systématique des ressources nationales par les dirigeants du régime, se sont répandus depuis longtemps dans le monde entier.

Ce système injuste a infligé ses violences à chaque Iranien, sans distinction. Pourtant, les croyances erronées, la manipulation religieuse et l’instrumentalisation de la foi ont toujours contribué à diviser la société en quatre catégories : les contestataires, les agents de la répression, les indifférents et les opportunistes. L’histoire prouve que les régimes religieux n’engendrent que dictature et populisme, par l’exploitation des sensibilités spirituelles. Comment accepter qu’un citoyen verse le sang de son frère ou de sa sœur, sous prétexte de défendre la religion ou la « velayat », quand cette violence est sanctifiée par des fatwas frauduleuses et déshumanisantes ?

Les catégories de contestataires

À l’intérieur du pays :

  • Ceux qui, au péril de leur vie, descendent dans les rues pour dénoncer les injustices.

  • Les intellectuels, écrivains et penseurs qui, par leurs écrits, prônent une culture de contestation pacifique.

  • Les « suiveurs » impulsifs, qui sans but clair, transforment leur colère en actes de vandalisme.

  • Les journalistes indépendants et les reporters citoyens, qui font résonner la voix du peuple.

  • Ceux qui expriment leur opposition par le boycott silencieux : abstention électorale, refus de participer aux campagnes officielles.

  • Enfin, la majorité silencieuse, animée de colère mais paralysée par la peur de perdre travail, famille, statut ou vie.

À l’extérieur du pays :

  • Les soutiens actifs qui amplifient la voix du peuple à travers médias, pétitions, financements ou plaidoyer politique.

  • Ceux qui organisent des rassemblements symboliques et légaux pour exprimer leur solidarité.

  • Les individus qui, par un boycott personnel des élections, marquent leur désaccord.

  • Et enfin, les pseudo-contestataires opportunistes qui transforment les manifestations en scènes de violence, discréditant le mouvement.

Les agents de la répression

Ils regroupent toutes les forces liées à la survie du régime : les Gardiens de la Révolution, les milices Bassidj, les services de renseignement, les « soldats anonymes », les partisans inconditionnels et leurs relais régionaux. Leur objectif : écraser toute dissidence par l’arrestation, la torture ou la mort.

Les indifférents

Ils se divisent en deux groupes :

  • La classe aisée, qui ne voit dans les luttes populaires aucune incidence sur son confort ou ses privilèges.

  • Les religieux fidèles, pour qui toute critique du régime est un blasphème. Ils acceptent les injustices comme une « volonté divine », attribuant les problèmes aux pressions occidentales.

Les opportunistes

Deux sous-catégories se distinguent :

  • Les opportunistes économiques, qui tirent profit des troubles pour spéculer sur le marché noir ou alimenter le trafic d’armes.

  • Les opportunistes politiques, partis et groupes marginaux qui utilisent les protestations pour propager leurs idéologies, imposer leur radicalisme et s’arroger une légitimité. Ceux-ci se montrent souvent hostiles à toute autre opposition et qualifient leurs détracteurs d’agents du régime.

Enfin, il faut citer les mercenaires du régime, présents en Iran comme à l’étranger, qui incitent les gens à voter, même blanc, au nom de « réformes ». Or chacun sait : toute participation gonfle artificiellement le taux de participation et légitime le système. Depuis des décennies, il est clair que le vote n’a aucun effet réel sur le résultat des élections.

Conclusion

Les Iraniens ont déjà connu une révolution avortée et quarante-trois ans de répression. Ni les mères n’ont encore la force de sacrifier leurs enfants, ni le peuple n’a l’énergie de subir les coups des matraques. Dans une dictature, toute manifestation de rue est un jeu mortel. Dans le monde moderne, le boycott constitue une forme de résistance pacifique et efficace.

Ainsi, un boycott massif des élections peut remettre en cause les fondements mêmes du régime. Si fonctionnaires, enseignants, étudiants et citoyens s’unissent dans cette démarche, l’existence du système islamique sera fragilisée.

En tant qu’opposants en exil, nous devons dire « Non à la République islamique » et œuvrer à élever la conscience collective, transmettre la voix des Iraniens au monde et préserver la légitimité d’une lutte pacifique.

Car aucune dictature, aucune opposition non plus, ne peut survivre par la violence, le sang ou la diffamation. Le moment est venu d’unir nos forces, d’éviter les divisions et de préparer l’après. La seule alternative viable : une République démocratique, inclusive, sans religion d’État, fondée sur la souveraineté du peuple.

Dans les terres les plus arides peuvent éclore les fleurs les plus rares. De même, dans les déserts de l’oppression peuvent naître des prises de conscience inédites. Croyons en ces germes d’avenir.

Par le boycott des élections, nous remettrons en cause la légitimité même de la République islamique.

Écrit le 4 juin 2021
Ehsan Tarinia – Luxembourg